THEATRE CINEMA ENTRE HORS SOL, IMAGINAIRE et MONDE REEL

Festival d’Avignon , un amour fané par les logiques marchandes au goût de cendres

Mais mais…qui en son sein contient les chaudes braises de ces compagnies qui osent remonter le courant !

Comme dans la société française qui bouge.

Et dans le « Festival », le festival des films aux cinés UTOPIA (Manutention et République ) la classe des cinés dit autrefois d’Arts et d’essais (en B)

On vous en donne un aperçu, théâtre et cinéma, choix parfaitement partisan, tout en rêvant d’autres lieux pour d’autres Festivals non ou peu marchandisés, comme par exemple celui de « la poésie méditterranéenne, » à Lodève , où les textes s’écoutaient les pieds dans l’eau…

AVIGNON juillet 2017 Théâtre

Trois semaines en été voient une cité fatiguée par les chaleurs, les gaz à particules, les fritures, la droite dure et l’austérité, investie par des milliers de compagnies.
Toutes les salles possibles et imaginables sont louées au prix fort pour accueillir les spectacles et les spectateurs
Les rues sont alors des théâtres aux défilés sonores, aux spectacles OFF du OFF,  aux décors de milliers d’affiches , aux batailles entre démarcheurs le discours insistant et le flyer à la main qui peuvent parfois rappeler des guêpes sur un gâteau.
Cette débauche de « comm » c’est pour prendre sa part d’un marché où la concurrence est à son paroxysme et où il faut coûte que coûte rembourser la dépense sous peine de couler,  vu que les subventions publiques sont en baisse avec la baisse des dotations de l’état aux Collectivités locales….qui préfèrent (souvent) sabrer la culture qu’un nouveau rond point.

Les classes moyennes qui viennent ici sont peut être encore hantées par le fantôme de Jean Vilar et voudraient sans doute, lassées par la course à la compétitivité  et à l’ubérisation, vivre des moments d’esprit dans un monde dépourvu d’esprit.

Dès le spectacle terminé nous les voyions néanmoins s’adonner en masse aux restaus, soldes et glaces à toute heure (notre photo)

« Ma copine ne suce pas que des glaces » a connu l’affluence pendant des années  et « Comment faire l’amour à un belge » le connaît ,  en tout cas  plus que le récital « Apolinaire mes amours » (vu et à voir, textes dits par Christian Sterne de la Cie « les fous de Bassan » ! (1) )

Pour nous observateurs  de l’évolution du festival sur des dizaines d’années, l’essentiel semble désormais se jouer dans la consommation d’un  « bon moment » entre spectaculaire, esthétisme et hors sol. C’est le grand marché de la culture « mainstream » : se divertir, s’étourdir ou tout simplement rire puis trouver le bon restau…puis remonter la « Ré » en suçant des glaces…et rentrer chez soi l’esprit à raconter ce qu’on a déjà oublié en tout cas moins préoccupé de l’avenir en commun…

Néanmoins, des poches et des zones de résistances et d’alternatives nous régalent chaque année d’un autre festival qui ose ramer à contre courant,  percutant et audacieux ! Vilar n’en aurait pas rêvé, lui  trop « démocratisation culturelle » pas trop « démocratie culturelle » !!! (on s’en explique ailleurs )

Cette année nous avons pu dénicher et donc savourer de bons crûs qu’on veut partager (outre le récital Apollinaire/ Prévert, cité):

1-La compagnie « Un pas de côté » avec la trilogie de Nicolas Lambert sous le titre global de « l’A-démocratie », qui donne à voir le dessous des cartes sans être roboratif : Affaire « Elf, la pompe Afrique », le commerce de l’armement avec « Le maniement des larmes », le choix du tout nucléaire  depuis la libération, avec « Une fission française »  (vu après les deux autres, à voir pour  le décorticage des antichambres, bref de l’éduc pop nouvelle pur sucre..

2-Comment va le monde ?
La stupéfiante performance d’une comédienne en solo Marie Thomas, dans un costume de clown de la misère sociale et qui par un jeu de langage à la Devos, réalise les dénonciations les plus radicales du monde marchand tout en finesse d’esprit . Un régal esthétique et plein de sens.

Auteur :Marc Favreau Théâtre des Déchargeurs à Paris

3-« Argent, pudeur et décadence »..
Une comédie financière « insolente » pour ne pas dire radicale…avec deux comédiennes époustouflantes sur un sujet difficile : la monnaie , de sa création à notre addiction. Par l' »AIAA compagnie » !!!!

4-« Discours à la nation »
Par Charlotte Adrien du Théâtre de la Passerelle sur un texte de Ascanio Celestini, qui par la bouche de dominants,  envoie au peuple un miroir renversant : qu’il est immobile , « chacun dans son trou » et « qu’en un million d’années la mouche, non plus, n’a pas appris à échapper à l’araignée ». Ca interroge, comme on dit, et à la sortie, on continue…

5-La violence des riches »
Attendu.
On se disait que là ça allait être un peu didactique eh bien sinon pas du tout du moins la Cie « Vaguement Compétitifs » s’empare de la sociologie des dominants (Pinçon-Charlot) et en tire un exercice qui là aussi marie fort bien « éduc pop » « politisante » et théâtre , du vrai, du bien mis en scène et du bien joué !

6-Et les FRALIB ?
1336 journées de lutte contre la multinationale qui les employait sous la marque ELEPHANT ? 1h30 de récit simplement lu. Et on est  comme revigoré par leur dignité qui leur fait  refuser les 90 000 € de prime de départ !!! »Il n’est pas de sauveur suprême, ni César, ni tribun, …producteurs sauvons nous nous mêmes ». Et ils se sont sauvé : en créant la SCOPTI (scop provençale de thés et infusions). Disons à 4 sur 10, les autres ayant préféré l’indemnité.

ATTENTION : Ils ne seront tirés d’affaire que si nous les aidons à franchir un cap difficile.
Comment ?
Par un chèque à la SCOPTI socio financement, 500, avenue du Pic de Bertagne, 13420 GEMNOS ou sur leur site scop-ti.com

1) Jours pairs : « L’orchestre et les choeurs de ma bouche te diront mon amour » et jours impairs « Nos coeurs pendent ensemble au même grenadier

1) Jours pairs : « L’orchestre et les choeurs de ma bouche te diront mon amour » et jours impairs « Nos coeurs pendent ensemble au même grenadier

AVIGNON juillet 2017 CINEMA

Sous l’imposant Palais des papes au débouché du verger du pape Urbin V,  il est une zone libre qui abrite café, restau et cinéma d’art et d’essai  dit de la Manutention, 4 , rue des escaliers Ste Anne qui accueille dans une zone non trop marchande ni festivalière, avec souvent de la musique mais surtout un complexe de salles d’art et d’essai du groupement UTOPIA cinéma ( l’autre ciné la République étant demeuré au fond de l’impasse rue Figuière proche de l’Avenue de la République)
C’est ici qu’on se rattrape de films qu’on n’a pas pu voir jusque là . Car Utopia y fait son cinéma de Festival

Voici quatre films à voir absolument selon nous qui les avons vus et les ressentons encore

IMPITOYABLE

De Clint  EASTWOOD 1992

L’ouest des vachers après l’extermination des indiens, en 1880

Dans la minable bourgade de Big Whiskey, dans le Kansas, le plus violent de tous, c’est  le shérif Bill Dagget, qui fait régner l’ordre en désarmant et frappant  à terre les citoyens qui n’auraient pas lu l’écriteau qu’il faut déposer ses armes quand on entre dans le pays. Sur des terres encore sauvages c’est une sorte de western qui va naître du désir de vengeance de prostituées dont une des leurs a été défigurée par un fermier des environs. Le scénario dévoile l’extrême violence originelle sur laquelle la nation américaine s’est bâtie et qu’elle a si bien exportée dans le monde.

Il y a eu le Vietnam, le Chili de Pinochet, l’Afghanistan, l’Irak,  toute l’Amérique latine sous sa botte et celle de ses multinationales.

KOBLIC

de Sébastien BORENSZTEIN justement c’est en 1977 que ça se passe, en Argentine dominée par la dictature militaire à la botte des USA et dont « les escadrons de la mort » ont été formés par les français tortionnaires en Algérie. (livre de MM Robin). Un ancien pilote de l’armée qui ne veut plus obéir aux ordres, trouve refuge dans un petit village du sud. Il est obsédé par le souvenir du largage qu’on lui a imposé, d’une cargaison d’opposants politiques au-dessus de l’océan. Le Il ne parle à personne et fait juste de l’épandage de pesticides… jusqu’à ce que le commissaire du pouvoir commence à s’intéresser à lui. Entre polar et western, un drame politique et un drame psychologique interagissent dans ce film d’une grande puissance et c’est tout ce qu’on aime. Pas le hors sol psychologique ni le sous sol sans étoile. Ce film nous tient en haleine jusqu’à une fin jubilatoire mais violente comme elle ne peut être guère autrement dans cette époque sinistre de l’histoire Argentine.

DUNKERQUE

Eh oui un grand film historique, pas un docu, un film à images époustouflantes, à énorme suspens, autour de l’enjeu de la survie de 400 000 hommes, anglais et français,  coïncés dans la poche de Dunkerque en mai 1940. Un suspens qu’on revit d’heure en heure et dont l’issue a déterminé les suites de la guerre au moins la non capitulation de l’Angleterre…Ca fait réfléchir… Christofer NOLAN l’a réalisé.

ON THE MILKY ROAD
Ecrit et réalisé par Emir KUSTURIKA (Serbie 2017)

Un film si baroque et truculent , si poétique et si mélancolique,  dans des paysages serbes grandioses  nous fait cependant  longuement cheminer en réflexion profonde sur la tragédie de la guerre en général de celle, civile, yougoslave en particulier, le tout tricoté avec des ciels immenses, des montagnes en abîmes, de la musique, de l’amour entre un laitier (Emir lui même) et une belle italienne (Monica Bellucci laquelle pleure au début à regarder le film soviétique si poignant « Quand passent les cigognes » (Palme d’Or 1957))

C’est aussi la recherche d’un paradis perdu aussi verdoyant  et limpide que les montagnes et l’eau des torrents de là bas..

André Duny jeudi 20 juillet de retour d’Avignon