(pour réflexion)
PREAMBULE
Le mouvement des gilets jaunes …(a)… réinventé la démocratie directe. Il a tiré sa force de son refus de toutes les organisations existantes, de son choix de l’auto-organisation et de son intelligence collective exceptionnelle.
Mais les outils qui ont permis l’insurrection ….sont ceux qui … entravent toute structuration interne, dont dépend la suite du mouvement, et pourraient l’handicaper très sérieusement.
La facilité d’utilisation des « réseaux sociaux » électroniques, leur relative gratuité, leur souplesse et leur instantanéité les a fait rentrer dans notre quotidien, au point de faire partie intégrante de notre vie sociale et même de la remplacer. Ils semblent devenus indispensables pour les mouvements sociaux et politiques. Ils permettent de se rassembler autour d’idées partagées, de créer des mouvements à grande échelle et de court-circuiter les grands médias, les syndicats, les partis. Ils participent aux grandes insurrections depuis dix ans comme Twitter en Iran en 2009 ou Facebook en Tunisie en 2011, comme la presse l’a fait en 1789 ou la radio en1968.
Mais ils ne sont pas adaptés du tout à l’installation d’un mouvement dans la durée et encore moins à la pratique pleinement démocratique du pouvoir populaire.
Et c’est l’enjeu des « Gilets jaunes », bien au-delà de la contestation d’une taxe, d’une politique ou d’un président : l’heure est au combat contre tout un système qui nous a mené là et à l’invention d’une démocratie directe, qui ne peut se faire que par l’enracinement, la structuration et la coordination des groupes locaux physiquement réunis.
Il est clair à tous que le succès du mouvement n’est pas dû à Facebook : il émane des rencontres, des actions concrètes, des blocages, des occupations, des manifestations, de la détermination et d’un courage tout humain. Il se nourrit de l’entraide concrète, de la solidarité locale, de l’implication charnelle, de la fraternité retrouvée, de l’intelligence collective, de la spontanéité et de l’imagination d’un peuple qui se redécouvre et se reconstitue.
Les initiatives les plus fertiles sont dans le monde réel, hors d’internet et de son monde parallèle. Ceux qui agissent le font hors des « réseaux sociaux », ceux qui inventent le monde de demain le font autour d’un verre ou d’un brasero, ceux qui dépassent les vieux clivages politiciens le font les yeux dans les yeux.
La méfiance vis-à-vis des « réseaux sociaux » électroniques est déjà intuitivement la règle au sein des « gilets jaunes ».
Mais tant que l’organisation, la direction et l’avenir du mouvement dépendra plus du Web 2.0 que des liens réels tissés entre des gens physiques à toutes les échelles, il risque de ne pas dépasser son stade actuel et d’échouer dans sa tentative de fonder le nouveau régime politique vers lequel il tend, la démocratie directe.
A
LE PIEGE DES RESEAUX SOCIAUX
Les réseaux sociaux électroniques nous rendent vulnérables.
Tout le monde voit bien que Facebook est aussi un grand fichier d’informations et de fichage des individus. Il donne aux services de renseignements, mais aussi aux groupuscules dangereux et aux personnes malveillantes toutes les informations nécessaires et les moyens pour faire pression, harceler, adresser des menaces, exercer un chantage ou inculper sous n’importe quel prétexte et à moindre coût. (NDLR :
• Les réseaux sociaux électroniques sont très fragiles. Un pouvoir aux abois
n’a besoin que de quelques minutes pour faire supprimer
un message, un compte, une page, un blog, ou briser n’importe quel lien
existant. C’est l’expérience des dissidents dans les pays dictatoriaux. Un
mouvement qui ne se baserait que sur ces relations informatisées peut
s’effondrer immédiatement, sans que le gouvernement ait recours à la force.
• Les réseaux sociaux électroniques permettent toutes les manipulations.
L’anonymat sur internet peut être une force mais aussi un
moyen facile de pratiquer l’entrisme. N’importe qui peut propager une rumeur,
se faire passer pourquelqu’un d’autre, infiltrer n’importe quel milieu, semer
le doute ou la discorde. C’est évidemment la stratégie des psychopathes, des
militants idéologisés, des agents de l’ordre plus ou moins officiels.
• Les réseaux sociaux électroniques sont sources de confusion. Ils sont le
royaume du tout et du n’importe
quoi, les fausses informations se mélangent aux révélations explosives, les
réflexions intelligentes côtoient les lubies caractérielles et le travail de
qualité se confond avec la malhonnêteté et la perversité.
Tout ce qui nous
empêche de voir clair y prolifère : vieux dogmes et nouvelles idéologies,
complotisme et conspirationnisme, crédulité et scepticisme, gourous et
prophètes, pervers et démagogues, le tout en des vidéos de quelques
dizaines de secondes ou en deux ou trois phrases.
• Les réseaux sociaux électroniques provoquent l’hystérie. Ils font régner la
facilité, les messages étant de plus en plus court et visuels, l’immédiateté et la frénésie, les nouveautés tombant en continu, l’impulsivité, chacun réagissant au coup-par-coup. Ils sont évidemment hautement addictifs, au détriment des formes traditionnelles de sociabilité, de discussion et de réflexions.
Ce n’est pas le nombre de vues ou de
« likes » qui doit décider, dans la précipitation fébrile des « clics », d’un
représentant, d’une revendication ou d’un mode d’action.
• Les réseaux sociaux électroniques isolent et déshumanisent. Ils peuvent
être efficaces concernant des questions strictement techniques, mais certainement pas pour des délibérations importantes.
Alors qu’aujourd’hui tout fait question, tout s’écroule et est à réinventer, il nous faut des lieux de rassemblement, de rencontre, d’échange, où nous pourrions créer une autre
manière de faire société. Nous avons besoin de nous parler, directement, pour nous comprendre, nous faire confiance, nous accompagner mutuellement, élaborer ensemble une nouvelle société en commençant par des réunions de gens « réels ». Celles-ci sont aussi invisibles des médias que de Facebook,dans l’exacte mesure où elles sont peu spectaculaires et souvent laborieuses.
• Les réseaux sociaux électroniques appartiennent à l’ennemi. Le monde
construit par les relations électroniques, c’est celui que nous contestons : c’est une société éparpillée, peuplée d’inconnus que l’oligarchie domine ; une pseudo-démocratie fondée sur l’émotion éphémère au profit des puissants ; un univers habité par des écrans, des appareils, des machines, des techniques qui infantilisent et déresponsabilisent ; une civilisation qui consomme de plus en plus d’énergie, rendant progressivement la planète inhabitable.
Les « réseaux sociaux » électroniques ne font que remplacer les liens familiaux, amicaux, de travail, de voisinage et de luttes.
Ils prospèrent sur la déliquescence de notre
société, au rythme de sa transformation en désert social et participent de fait
à la fragmentation en communautés, tribus, bandes, déstabilisant nos psychisme
et créant un
sentiment d’irréalité.
Une démocratie directe nécessite un
peuple vivant,
uni, fondamentalement humain, traversé
de contradictions et d’oppositions mais capable de les regarder en face et,
plus que tout, de transformer la réalité. Cela implique de renouer des liens élémentaires disparus, de retrouver des
réflexes de convivialité et de
dialogue, indépendamment de toutes les institutions et de toutes les machines. Déléguer à des
algorithmes la forme la plus élémentaire de faire société, la
relation affective dans toute son épaisseur et sa complexité, conduit tout
naturellement à déléguer l’action concrète puis le pouvoir politique à
quelques-uns, avec l’illusion d’y participer.
C’est un des enjeux les plus massifs, les plus difficiles et certainement le plus durable du mouvement en cours : retrouver la capacité de faire peuple, de retisser une société vivante et sensible.
Ce n’est pas l’informatique qui doit conditionner l’audace, l’intelligence et la sagesse d’un des plus beaux mouvements populaires de toute l’histoire de France.
Lieux Communs 4 décembre 2018
FACEBOOK et les MOBILISATIONS SOCIALES et ECOLOGIQUES
(et la POLLUTION CACHEE de l’INTERNET…..)
Merci Mr Mondialisation
FaceBook de Mr Mondialisation
Loin de nous l’idée de taper sur Netfix en particulier, mais les chiffres permettent de remettre les choses en perspective dans le champ argumentatif en matière de pollution liée au web.
Souvenez de ces trolls anti-écolos qui vous disent « oui mais ton Tweet il a pollué aussi » ou « vous êtes sur Facebook et ça pollue aussi » à toute occasion quand vous osez exposer une réalité dans le but de tourner vos arguments en dérision. Il vous serait interdit de trop penser car vous écrivez sur Internet…
Quand certains disent qu’Internet est polluant, c’est vrai. Pratiquement deux fois plus que l’aviation mondiale. Mais il n’est pas devenu polluant avec du texte publié, des JPG et encore moins du contenu culturel. La VOD, le porno et le monde du divertissement vidéo a littéralement fait exploser la facture écologique du web en moins de 10 ans tant les flux de données sont incomparables.
Une demi-heure de vidéo équivaut à 1.6kg d’équivalent CO2. Une demi-heure ! En comparaison, utiliser Facebook pendant un mois (faudrait tt de même rapporter au temps d’utilisation, non ? NDLR) émet autant de CO2 que de boire une tasse de café à peine 2 grammes (production mais aussi transport, svp ?). Les rapports sont astronomiques, fondamentale- ment incomparables.
C’est un peu comme comparer la pollution émise par votre dernière douche avec celle de Total pendant un an. Des chiffres qui exposent la rhétorique réactionnaire de ceux qui veulent vous interdire de lutter sur les réseaux sociaux au nom de votre prétendue pollution.
Loin de nos écrans, les infrastructures peinent à trouver des alternatives propres et la croissance du secteur écrase les éventuels efforts locaux. (Certes !)
Un train lâché en pleine vitesse dont nous sommes malheureusement tous devenus dépendants. Et les petits gestes individuels ne suffiront pas. D’où l’importance de lutter sur le fond, de faire évoluer la société dans son ensemble.
Nous sommes face à un problème identique lors des injonctions rhétoriques à fermer notre robinet quand on se brosse les dents ou faire pipi sous la douche pour sauver la planète. On peut évidemment le faire, mais c’est un grain de sable jeté dans un volcan en éruption qui, quand il est promut par ceux-là même qui maintiennent en vie un système profondément pollueur, cherche à éloigner les individus de tout raisonnement structurel.
(Texte sous C.C. à utiliser librement avec mention de l’auteur)