Lettre N°10 du Collectif « Changer de cap » dont la CEN est membre ……28 mars
L’épidémie mondiale de coronavirus progresse chaque jour sans savoir quand elle s’arrêtera. Son importance est directement liée au non respect de notre écosystème et à l’imprévoyance engendrée par le tout marché, au nom d’une croyance de nature religieuse dans les dogmes libéraux. Au nom de la compression des coûts, les recherches sur une pandémie pourtant annoncée n’ont pas été menées. Les stocks stratégiques ont été supprimés et les services de santé publique ont été démantelés. Nos pays,comme la cigale, ont donc été forts démunis quand la pandémie est venue.
Face à la situation, le 16 mars, Emmanuel Macron a du se résoudre à annoncer « la « suspension » de toutes les réformes en cours, à commencer par la réforme des retraites » La privatisation d’ADP a été « suspendue » et la réforme de l’assurance-chômage « repoussée ». La résistance d’une majorité de Français a donc fini par être efficace, car elle a réussi à retarder de façon salutaire la destruction programmée de l’État social.
Le 16 mars, Emmanuel Macron a accentué ce virage en redécouvrant les vertus du service public et de l’hôpital, fustigés jusqu’à ces dernières semaines. Il va même jusqu’à reprendre les principales thèses du mouvement social, en parlant d’un changement de modèle de développement nécessaire. La santé gratuite et l’État-providence, ne sont plus des coûts mais des biens précieux, des atouts indispensables. Certains biens et services doivent être placés en dehors des lois du marché ». Pour Alain Supiot, il s’agit bien d’un choc de réalité.
Cette volte-face n’est pas propre à la France. Le gouvernement allemand revient sur sa règle d’or institutionnelle du « zéro déficit budgétaire. La commission européenne annonce le renoncement à la règle des 3 %. et Donald Trump est désormais favorable à l’Obama Care pour tous. Nos décideurs prennent brusquement conscience de la fragilité d’un monde totalement interconnecté et de l’importance des productions stratégiques. La paralysie de l’économie provoque un krach financier. La mondialisation néolibérale s’effondre comme un château de cartes , obligeant le Titanic à une manœuvre désespérée.
Pour maintenir en vie les entreprises, les États ouvrent grand les vannes, après avoir prétendu que les caisses étaient vides pour justifier des politiques austéritaires. Ils espèrent, malgré l’évidence, que cette crise sanitaire ne pas être qu’une courte parenthèse. Mais l’effondrement boursier risque de se poursuivre avec la gestion aberrante de la pandémie aux États-Unis, l’éclatement d’une énorme bulle de dette privée, les faillites prévisibles de compagnies aériennes, d’entreprises de gaz de schiste, etc. avec d’innombrables effets en chaîne, et la situation devient imprévisible.
Dans l’urgence, les capitalistes sont prêts à sacrifier de nombreuses vies et à supprimer les libertés publiques, afin que « tout change afin que rien ne change ». Les salariés du service public sont loués pour leur dévouement, mais au dela des mots l’austérité n’est pas remise en cause. Bien plus, pratiquant la stratégie du choc, le gouvernement restreint encore le droit du travail jusqu’à décembre 2021: travail hebdomadaire jusqu’à 60h, congés et RTT décidés par l’employeur, travail le dimanche, … sans s’engager sur la suppression de ces mesures.
Enfin, le confinement et les risques ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Alors que les plus riches ont émigré à la campagne, beaucoup sont confinés dans quelques m2, des personnes isolées ou en institution sont privées de tout contact pendant près de 2 mois, des femmes et des enfants victimes de violences sont sous le joug de leur bourreau, certains n’ont plus à manger… Ceux qui doivent poursuivre leur activité salariée sont souvent sans aucune protection et qui rentrent chez eux la peur au ventre, craignant d’infecter leurs enfants.
Que faire ?
Dans l’immédiat nous somme confinés. Mais le confinement nous permet d’accumuler une énergie qui se manifeste à 20 heures sur les balcons, et aussi à travers les soutiens mutuels à distance. Tout en respectant la nécessité absolue du confinement, d’innombrables actions ont été inventées depuis 15 jours, bien au-delà des cercles militants, pour s’entraider, accompagner les plus fragiles, garder les enfants de ceux qui doivent continuer à travailler, partager des informations, transformer notre angoisse en mobilisation. Des centaines de groupes d’entraides se sont constituées, dont beaucoup se sont rassemblés dans le réseau COVID-ENTRAIDE (voir ci-dessous).
Cette solidarité réhabilite l’esprit de fraternité en dépassant l’idéologie individualiste qui nous était imposée. L’entraide qui se développe ne saurait être le cheval de Troie d’une future stratégie du choc à base de télétravail, de volontariat citoyen dans les services publics détruits, de poursuite de la destruction des acquis sociaux au nom de l’État d’urgence sanitaire et demain d’un état d’urgence économique. Il n’y aura pas de sortie de crise sans un bouleversement majeur de l’organisation sociale et économique actuelle.
Des collectifs citoyens locaux, des associations citoyennes, des groupes de gilets jaunes étaient donc j’ai lettre déjà depuis un an dans cette dynamique et construisent des alternatives concrètes pour changer la vie dès à présent, là, où ils sont. L’auto-organisation des gens eux-mêmes est un des plus puissants leviers d’action et de construction collective. Par exemple, de nombreuses coopératives d’énergies citoyennes voit le jour en France, en Allemagne ou en Belgique pour produire de l’électricité ou de la chaleur à partir d’énergies renouvelables. La régie de quartier d’Angoulême a créé une exploitation maraîchère bio, qui produit des légumes, des fruits, des plants de fleurs vendus au cœur d’un quartier sans commerces. En Haute-Loire, des gilets jaunes et des militants écologistes, prévoyant une crise écologique ou financière, ont réfléchi depuis 6 mois aux initiatives permettant de rendre les territoires plus autonomes et résilients. L’émergence de plusieurs centaines de listes citoyennes lors des municipales s’est également traduite par la mise en place d’assemblées citoyennes, de projet partagés, de nouvelles dynamiques.
Beaucoup utilisent le temps du confinement pour échanger sur les actions à mener et le monde à construire. Les télé-réunions se multiplient, les textes circulent. La suite de cette lettre propose un certain nombre de textes, qui constituent des supports d’échanges, de débats à distance et d’éducation populaire.
Dès maintenant, nous pouvons agir. L’onde de choc mondiale du coronavirus est la crise de trop qui doit marquer la rupture du système actuel d’exploitation et de destruction du monde et de notre planète. Tout dépend de notre mobilisation.
Confinés mais solidaires et mobilisés
Entraide et solidarité avec COVID-ENTRAIDE
Depuis le 12 mars, un appel a été lancé par 230 personnalités, (médecins, psychologues, réanimateurs, enseignant.e.s, comédien.ne.s, paysan.ne.s, artistes, chercheuses, scientifiques, musicien.ne.s, syndicalistes, éditrices, libraires) pour s’auto-organiser face à la pandémie et rejoindre le réseau de solidarité COVID-ENTRAIDE. Cet appel est aujourd’hui signé par plus de 8000 personnes . Pour signer l’appel c’est ici
Ce réseau s’est multiplié à la vitesse de l’éclair. Il regroupe aujourd’hui:
– plus de 400 groupes locaux, très diversifiés qui multiplient les actions de soutien aux plus vulnérables face au Covid-19d, aux soignant-e-s et à tous les services publics exsangues, d’entraide et d’auto-organisation à tous les niveaux (immeubles, hameaux, rues, quartiers, villages, villes, départements, régions). Certains organisent la résilience écologique et sociale, travaillent à autonomie des territoires, notamment alimentaire
– des groupes de discussion et de mise en relation des personnes se sont également mis en place sur les réseaux sociaux (Facebook, Telegram, etc.) sur différents thèmes, ainsi que la fourniture de ressources et la diffusion d’infos vérifiées et sourcées,
Le Collectif « Changer de cap » soutient et relaye cet appel. Avec tous les signataires, nous vous invitons à rejoindre le réseau en allant sur le site, à créer un groupe d’entraide (voir le tutoriel sur le site), et à l’inscrire sur la carte interactive
Quelques premiers exemples :
Saint Denis. Soutien aux sans-papiers
Un groupe d’entraide mutuelle s’est constitué à Saint-Denis. Il s’est réuni pour la première fois le 24 mars sur Zoom, avec une soixantaine de personnes dont des gilets noirs. L’idée de soutenir en priorité les ami.e.s squatteurs.euses et sans papiers
Montagne Limousine : de nombreuses initiatives solidaires
Dans de nombreuses communes de la Montagne Limousine, des initiatives ont été prises pour garder le contact et assurer la solidarité avec les personnes les plus isolées ou les plus exposées. Un réseau de communication se met en place pour les recenser et les faire connaître. Des groupes de réflexion se sont mis en branle pour réfléchir et agir sur les conséquences du confinement généralisé, sans pour l’instant mettre en doute son bien-fondé. Ils cherchent à mettre en place et renforcer les pratiques d’entraide entre habitants (services, information médicale ou juridique, écoute et soutien psychologique…), à s’organiser face à la fermeture des marchés, au renforcement des contrôles policiers intempestifs ou encore à la réduction progressive des canaux d’approvisionnement locaux. Voir ici la lettre
Le groupe Covid 19-Entraide Poissy compte déjà 281 membres.
Ouvert, à tous il permet aux habitants de publier des demandes ou des offres d’aides ponctuelles. « Je souhaite avoir des informations sur le personnel soignant qui travail a l’hôpital de Poissy et/ou Saint-Germain-en-Laye. Étant disponible j’aimerais leur apporter des pizzas samedi afin qu’ils évitent de faire leurs repas ! En espérant que ça donnera l’élan à d’autres personnes » lance Yassin. « Je peux me rendre disponible pour faire les courses d’une personne âgée ou garder des petits pendant que le parent va faire ses courses », propose Agnès. Voir la page facebook
Comprendre et débattre
Pour contribuer à la réflexion et au débat dans ce temps de confinement, à distance bien sûr, nous proposons une sélection de textes permettant de comprendre la pandémie, la façon dont elle est gérée, l’effondrement du système, et proposer des éléments de débat pour construire le monde après. NB. Pour ces échanges, il est possible d’utiliser Framatalk (voir ici le lien), logiciel libre et gratuit. Çà marche très bien.
Pourquoi l’épidémie est grave et comment elle est gérée
Le confinement va durer [un certain nombre de] semaines
Médiapart, 24 mars, entretien avec Marie-Paule Kieny, INSERM . Les pays européens n’ont pas pris la mesure de ce qui s’est passé. Pourtant, l’OMS nous enjoignait de tester, tester, tester…, mettre les patients positifs à l’isolement, tester les cas contacts, à identifier les contacts de contacts. Devant la progression de l’épidémie, il fallait prendre des mesures drastiques plus tôt. Tester en ce moment aurait du sens, mais l’épidémie et si étendue que tout manque. En France, même s’il s’est fait par petits pas, le confinement me paraît efficace. Ces mesures vont marcher, car elles ont marché dans d’autres pays. Mais cela va prendre plusieurs semaines. Pour le lever, il ne faut pas seulement attendre le pic et la diminution du nombre de cas graves, mais il faudra aussi que les lits de réanimation se libèrent. Or, les patients Covid les occupent pendant trois semaines en moyenne. Pour lire l’article c’est ici
Voir plus bas l’article de Henri Sterdyniak : « Tout plan pour la sortie de la crise sanitaire apparait aujourd’hui prématuré, parce qu’il n’existe aucune stratégie médicale et sociale envisageable pour sortir du confinement sans relancer l’épidémie ».
Trois décennies d’austérité pour l’hôpital public (13 mars)
Bastamag, Ivan Du Roy et Rachel Knaebel, 13 mars. Il aura fallu une pandémie risquant de faire imploser l’hôpital public pour rompre avec 30 ans d’austérité, alors que depuis un an, les services d’urgences ont multiplié les grèves, les actions et les « SOS » pour dénoncer les effets dévastateurs des restrictions budgétaires et des suppressions de lits. L’article précise comment est organisée la pression sur les hôpitaux. On commence par chiffrer l’activité de l’hôpital, puis on fixe des « objectif des dépenses de santé » à ne pas dépasser quels que soient les besoins, on instaure la tarification à l’acte et on pousse les hôpitaux à s’endetter, enfin une loi consacre les directeurs-managers contre les médecins. Voir ici l’article de Bastamag
L’insoutenable légèreté du capitalisme vis-à-vis de notre santé
Le Nouvel Observateur, 23 mars, Eva Illouz. Dans ce texte qui souligne le lien étroit entre santé et économie, la sociologue franco-israélienne Eva Illouz analyse la crise planétaire du coronavirus. Elle dénonce « l’imposture » du néolibéralisme qui, privant l’Etat de ses ressources, a sacrifié le monde dont il se nourrit. Voir ici l’article du Nouvel Observateur
Plainte du collectif C19 pour « mensonge d’État »
Les déclarations contradictoires d’Agnès Buzyn ont montré que le gouvernement était dès le mois de janvier conscient de la gravité de la crise mais si n’a rien fait. Une plainte a été déposée par 600 médecins devant la Cour de Justice de la République. Les plaignants accusent ces deux figures politiques de s’être « abstenus » de prendre à temps des mesures pour endiguer l’épidémie de Covid-19, précise leur avocat, alors qu’ils avaient conscience du péril et disposer des moyens d’action. Cette plaine a déjà reçu l’appui de 243 000 personnes. Pour signer la pétition c’est ici
Une seule stratégie : dépister, confiner, traite massivement les détectés
Blog de Jean-Dominique Michel, anthropologue de la santé, 18 mars. Pour l’auteur l’épidémie serait presque banale au regard de la surmortalité saisonnière si on ne manquait pas de lits d’hôpitaux, de tests et de mesures de dépistage. 99 % des personnes décédées souffrent d’une autre pathologie chronique, avec un âge moyen de 79,5 ans. Elle fait de surcroît l’objet d’une véritable hystérie médiatique qui accentue l’angoisse sociale.
La seule stratégie qui fasse sens est de dépister massivement, de confiner les positifs et leur entourage, de les traiter, tout comme les cas à risque, notamment avec la chloroquine ou le favipiravir. Nous disposons d’une médecine de qualité, mais d’une santé publique moyenâgeuse. Heureusement, on peut espérer, car le vent change vite et bien. Le dépistage de masse est enfin une priorité sanitaire. Avec cette stratégie, ce peut bien être « Fin de partie ! pour le Covid 19. Pour lire l’article, avec de nombreux liens vers d’autres infos, c’est ici
Pour Emmanuel Macron, tout l’enjeu est de sauver le capitalisme sanitaire et ses grandes industries
Bastamag, entretien avec Pierre-André Juven, par Barnabé Binctin 27 mars 2020. Quand Emmanuel Macron annonce un « plan massif d’investissement pour notre hôpital », il faut bien comprendre ce que le Président entend par État-providence. Dans son optique, l’État-providence doit surtout déployer les conditions d’épanouissement du marché qui, en retour, amélioreront les conditions de vie des personnes. Quand, il avance que la santé n’a pas de prix, cela peut très bien signifier que l’État va consacrer des moyens importants pour les grandes industries de santé et pharmaceutiques. Il y a fort à craindre qu’il soit plus sensible à ce que disent Sanofi et Samsung qu’à ce que réclament les soignants de l’hôpital public.
Il cherche à désarmer la critique et la colère, c’est assez compréhensible. Il sait que beaucoup de gens ne lui pardonnent pas le mépris qu’il a affiché depuis un an pour le mouvement hospitalier, et son refus d’améliorer les conditions de travail des soignants. Ceux-ci ne sont pas dupes et le disent, « on y croira quand ce sera fait ». Ils ont raison.
La colère des soignants est encore plus vive et beaucoup l’expriment. Pour l’instant, ils soignent et ils sauvent. Demain, ils iront présenter la facture à l’Élysée. Mais le gouvernement joue la carte bien connue de « l’héroïsation ». qui a une fonction bien précise : dépolitiser la crise de l’hôpital public. Le bruit des applaudissements finit par couvrir celui des cris d’alerte des soignants, assignés à une posture entièrement sacrificielle, allant jusqu’à mettre leur vie en jeu, où parler d’argent devient presque salissant. Lire ici l’article de Bastamag
Krach financier, effondrement et stratégie du choc
Le spectre de la Grande Dépression hante l’économie mondiale
Médiapart, 24 mars, Martine Orange. Alors que l’épidémie de coronavirus s’étend à une vitesse exponentielle, les conséquences d’une paralysie de l’économie mondiale deviennent chaque jour plus vertigineuses, alors que l’économie réelle ne s’est jamais réellement remise de la crise de 2008 et que la sphère financière, grâce à l’argent gratuit des banques centrales, s’est livrée à une débauche de crédits, de montages à effet de levier, de spéculations qui s’écroulent comme un château de cartes. Des milliers de milliards de dollars sont apportés en garantie aux banques pour éviter l’effondrement des marchés, mais cela ne suffit pas. La bulle de dettes privées est sur le point d’éclater. En une semaine, le nombre de chômeurs aux États-Unis est passé de 230 000 à 2 millions. On est au début d’une évolution comparable à celle de la crise de 1929. Voir l’article de Médiapart
Le coronavirus révèle l’extrême fragilité de la mondialisation néolibérale
Reporterre, 13 mars, Jean Gadrey. Le coronavirus n’aurait qu’un impact très limité sur l’économie d’un monde où la finance serait sous contrôle public, la monnaie serait un bien commun, la recherche et des productions essentielles (y compris énergétiques) serait relocalisée, où la sobriété matérielle et énergétique supplanterait le consumérisme, et où l’on mettrait fin à la domination des multinationales. Un krach financier du au coronavirus est fort probable. Plutôt que de se réjouir d’une récession mondiale imposée qui aurait des effets humains dévastateurs, la crise actuelle peut agir comme un révélateur des fragilités extrêmes de la mondialisation et contribuer à sa condamnation Voir ici l’article de Reporterre
Tout pour les entreprises, sans aucune condition : l’espoir secret d’une crise courte
Médiapart, 24 mars, Romaric Godin. Le pouvoir semble sans le dire tabler sur une crise courte. La récession actuelle a été provoquée pour sauver des vies. Le président a affirmé, non sans retard du reste, vouloir faire prévaloir in fine l’urgence sanitaire sur les nécessités économiques. Mais devant les effets d’un tel coup d’arrêt porté à l’économie marchande, le gouvernement n’hésite pas à mettre en danger de très nombreux travailleurs, souvent les moins qualifiés, en les incitant à travailler sans protection. Vis-à-vis des entreprises, l’État se substitue à leur activité économique pour assurer leur survie, mais sans fixer aucune condition, espérant que cela sera une parenthèse et que tout reprendra comme avant. Il perd ainsi une occasion unique d’imposer un vrai changement et de réorienter le modèle économique et productif français en plaçant au centre les priorités sociales, sanitaires et climatiques ? Voir ici l’article de Médiapart
L’état d’urgence sanitaire, une nouvelle destruction des droits
Jean-Claude Boual 22 mars, texte pdf. Jean Claude BOUAL analyse les dispositions du texte de loi, exorbitantes des dispositions légales, qui constituent une destruction quasi complète des droits des travailleurs. Elle est applicable pour une durée d’un an, mais rien ne dit qu’à l’issue on reviendra au droit normal et pérenne. Les débats porteront sur ce qui doit être conservé, comme cela a été le cas pour l’état d’urgence lui-même. Voir et télécharger ici l’article
Relire la stratégie du choc, montée d’un capitalisme du désastre Naomi Klein, 2007
Le livre de Naomi Klein est d’une grande actualité pour décrypter l’action du gouvernement face au coronavirus. Voir ici l’article de Wikipedia
Construire le monde d’après
ATTAC Une révolution écologique et sociale pour construire le monde d’après
Dans un document programme de 8 pages, ATTAC esquisse les contours de la révolution écologique et sociale qui devra être mise en œuvre pour permettre au peuple de reprendre le contrôle sur leur vie et sur leur avenir. Le document montre la nécessité de répondre à l’urgence, mais aussi de désarmer les marchés financiers, d’aller vers une intervention plus forte de la puissance publique pour contraindre les marchés, de développer une réelle solidarité internationale, d’aller vers une relocalisation des activités, d’organiser la décroissance matérielle et énergétique à l’échelle mondiale face aux limites physiques de la planète, et d’abord dans les pays riches. Cela doit se traduire par des « décisions de rupture » qui dessinent un autre futur. Pour voir et télécharger la note c’est ici
Alain Supiot. Seul le choc avec le réel peut ouvrir la voie d’un monde humainement vivable
Alter éco, 21 mars, Alain Supiot. Emmanuel Macron semble renier sa propre politique. Mais il s’agit plutôt d’un choc de réalité. Alors que l’Etat est garant de l’incalculable, qu’il s’agisse de l’identité et la sécurité des personnes, de la succession des générations ou de la préservation de la paix civile et des milieux vitaux, la pensée néolibérale repose sur la foi en un « ordre spontané du marché » qui place le droit sous l’égide des calculs d’utilité économique, et promeut un monde purgé de toute solidarité organisée, nouvel avatar des expériences totalitaires du XXe siècle. On ne peut donc que se réjouir de voir le Président de la République prendre conscience que la santé et l’État-providence ne sont pas des coûts et des charges mais des atouts indispensables. La crise sanitaire sans précédent que nous traversons peut conduire au meilleur ou au pire. Le meilleur serait qu’elle ouvre la voie d’un monde humainement vivable, qui tienne compte de l’interdépendance des nations tout en étant respectueux de leur souveraineté de leur diversité. Voir l’article d’Alteréco
Henri Sterdyniak. Sortir d’une crise sanitaire, prendre le tournant vers une économie sobre et solidaire
Blog Médiapart de Henri Sterdyniak. Tout plan pour la sortie de la crise sanitaire apparait aujourd’hui prématuré, parce qu’il n’existe aucune stratégie médicale et sociale envisageable pour sortir du confinement sans relancer l’épidémie.
Même si la politique budgétaire soutient l’activité et compense les pertes de salaires, le PIB devrait chuter de 6% en 2020 (pour un confinement de 2 mois). Mais cela est secondaire. Ce qui compte avant tout, c’est que chacun puisse bénéficier durant cette période d’un logement, de soins de santé, de produits alimentaires et d’hygiène de base, de réparations d’urgence… A la fin du confinement, certains vont surconsommer, mais le plus probable est que la consommation du plus grand nombre restera durablement inférieure. Vont-ils prendre conscience de l’inutilité de certaines dépenses, de la vanité des consommations ostentatoires, de l’urgence de la sobriété ? La période actuelle va-t-elle favoriser l’adhésion des personnes au tournant d’un mode de vie nécessaire à la transition écologique ?
Comment profiter de la crise pour prendre le tournant vers une économie sobre, solidaire, égalitaire, soutenable dans la durée ? Le risque est de repartir comme avant. Le gouvernement va-t-il éviter de relancer les entreprises polluantes, gaspilleuses, inutiles, nuisibles à la cohésion sociale ou à l’emploi, les entreprises financières, les entreprises qui ont délocalisé, celles qui pratiquent l’obsolescence accélérée, celles qui jouent de l’optimisation fiscale ? Sa tentation sera grande, compte tenu de la hausse probable du chômage, de ne pas y regarder de trop près.
Plus fondamentalement, il faudrait remettre en cause une croissance dictée par le capitalisme financier mondialisé. Dans le cadre d’une planification écologique et sociale, la production devrait se centrer sur les besoins essentiels ; les innovations polluantes devraient être interdites. Les préoccupations d’économies d’énergie, de matière, de pollution, d’atteinte à la nature devraient devenir centrales. Les services publics (santé, soins aux jeunes enfants et aux personnes âgées, éducation, culture) devaient être promus.